Dans la recherche, l’obtention d’un résultat n’est pas un phénomène prévisible. Les avancées ne suivent pas une loi de progression linéaire.
Illustration sur mes recherches actuelles. Je vous rassure, je ne rentrerai pas dans les détails. Je mentionnerai juste l’objet de mes travaux actuels, pour les quelques lecteurs qui sont familiers avec cette thématique : il s’agit de trouver une traduction structurelle efficace qui permette de passer d’un réseau de Petri évoluant en temps continu à un réseau doté d’une sémantique discrète.
Fin février, j’étais arrivé à un modèle théoriquement satisfaisant, mais présentant de nombreux défauts dès qu’il s’agissait de l’implanter informatiquement parlant. Pendant plusieurs jours, j’ai tenté de sortir de l’impasse dans laquelle il me semblait être arrivé, mais rien n’y faisait.
Alors, aux alentours du 10 mars, j’ai décidé de repenser complètement le modèle que j’avais conçu. Grâce à quelques discussions avec mes “chefs”, j’ai eu deux idées importantes qui m’ont permis de créer un modèle répondant à nos attentes. L’implantation informatique n’a pas posé de soucis majeurs, les résultats sont plutôt satisfaisants. Et j’ai complètement laissé de côté le premier modèle auquel j’étais parvenu.
Cette semaine, j’ai essayé d’étendre mon modèle à des cas encore plus généraux. Je me suis trouvé face à de nouveaux obstacles. Je les ai pris un par un et ai tenté de les contourner. Pour un problème en particulier, j’ai réussi à trouver une solution qui, si elle n’est pas forcément encore très efficace, a le mérite de répondre à la question posée. Par analogie, je me suis rendu compte que la méthode déployée dans ce cadre aurait pu me servir à répondre au problème auquel je m’étais heurté deux mois auparavant. Alors j’ai repris le cahier contenant mes recherches de février. J’ai gribouillé. Et j’ai finalement trouvé comment débloquer cette situation qui me paraissait, il n’y a pas si longtemps, définitivement compromise.
Fort des discussions que j’ai pu avoir avec mes collèges, des tentatives avortées, des papiers lus ici et là sur des thèmes connexes, j’ai réussi à lever l’aporie à laquelle je pensais être arrivé en février. Cela a été une surprise. Il y a un mois et demi, j’avais beau me creuser la tête, rien ne venait. Et c’est aujourd’hui, après avoir emprunté une toute autre voie, que j’ai finalement fait sauter le verrou. Un cheminement d’idée typique de la recherche. Voilà le genre de latitude qu’un industriel ne laissera que rarement à ses salariés : alors que la mondialisation, le durcissement de la concurrence et la course à la rentabilité sont désormais les maîtres mots du jeu économique, comment un chef d’entreprise pourrait-il laisser certains de ses employés travailler sur des thématiques aux résultats si imprévisibles ?
Un exemple parmi tant d’autres, qui illustre bien le fait que la recherche fondamentale ne peut pas se laisser absorber par le monde industriel, à l’heure où Alain Trautman (Sauvons la Recherche) et Edouard Bézin sont de nouveau reçus par Jean-Pierre Raffarin concernant la future loi d’orientation et de programmation de la recherche. Vous savez, cette fameuse loi qui était sensée être votée, au plus tard, fin 2004 …
Et si les cochons capitalistes ne suffisaient pas à nous pourrir la vie, voilà que leurs alliés objectifs du gouvernement se mettent à ré-écrire l’histoire sans un sens impérialiste ! Mobilisons nous camarades ! L’union des sciences dures et des sciences sociales fera trembler la Réaction : http://www.millebabords.org/article.php3?id_article=2307